LA RECOUVRANCE goélette brestoise
Lorient / Roscoff

8-9-10 août 2010


Pas de photo pour cette journée


7 août 2010 - Port de Lorient

Le Festival Interceltique bat son plein lorsque nous arrivons à Lorient dans le courant de l'après-midi. Je cherche à rejoindre le parking Nayel, le plus proche du ponton Belem où est amarrée La Recouvrance, mais les rues qui y mènent sont barrées. Je fais systématiquement l'inverse de ce que m'indique le GPS qui ignore tout de la manifestation! Un de ces jours, il va finir par m'engueuler à force de ne pas suivre ses indications.

Les abords du port de plaisance sont envahis par une foule composée de Lorientais bien sûr, mais aussi de vacanciers en tenue de plage et de Celtes "pur jus", membres de groupes folkloriques venus de tout le monde celte, de la Galiceà l'Écosse. La musique irlandaise et les chants de marins se succèdent au rythme du passage devant les kiosques et les étals des marchands de produits régionaux. Tout cela se passe dans une ambiance sympathique, mais la bière coule à flots ce qui laisse présager des nuits chaudes et agitées.

La Recouvrance se trouve à couple du Belem, à Lorient pour quelques jours. Même si le trois-mâts est loin d'être le plus grand de sa catégorie, La Recouvrance fait figure de petite sœur à côté! Cinq cent tonnes contre cent cinquante, la différence est considérable. Traversant le Belem pour rejoindre la goélette, je tombe sur José, marin du voilier qui était déjà à bord lors de notre stage de 2005, puis sur Aude, de la Fondation Belem, participant à l'avitaillement du bateau.

Après avoir déposé nos bagages,nous retournons à quai pour aller dîner, lorsque j'aperçois Annick Dumayet-Canevet, déléguée des Amis des Grands Voiliers pour le Morbihan. Le monde est petit dit-on, mais celui des Grands Voiliers l'est encore bien davantage.

De retour à bord vers 22h30, nous retrouvons l'équipage au complet. Jean-Hervé est en congés, c'est donc Yann qui commande le voilier. Yannick, bosco, et Maël, gabier, sont toujours là. Jean-Luc a été remplacé au poste de cuistot par Pascal, et Morgan le mécanicien par David.

Six passagers sont déjà installés, les quatre autres embarqueront demain matin.



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8 août 2010 - Port de Lorient / Audierne

Le petit-déjeuner est prêt pour 8h. Il faut absolument partir au plus tard à 9h, car ensuite nous n'aurions plus assez d'eau. Par ailleurs, nous avons une étape de 60 milles à parcourir, il ne faut donc pas chômer. Le dernier couple à embarquer étant arrivé, nous larguons les amarres à 8h40. Hélas, sortis de la rade de Lorient, nous constatons qu'il n'y a pas un souffle de vent. Le ciel est encore couvert, et nous glissons entre le continent et Groix sur une mer à peine ridée. Yann espère que nous toucherons un peu de vent après avoir dépassé l'île.

Vers 11h, deux magnifiques dauphins viennent jouer avec l'étrave de La Recouvrance. Mais au bout de quelques minutes, ils changent de direction. A midi, le moteur est enfin stoppé. On peut prendre l'apéritif puis déjeuner dans le calme.

A 13h le ciel est complètement dégagé. Comme prévu, le vent monte un peu. On met toute la toile. Mais le vent n'est pas très violent, et on a du mal à ne pas descendre en dessous de 4 nœuds. De plus, ce vent de nord-ouest nous oblige à effectuer des virements de bord pour essayer de remonter. Après deux virements de bord, on a toujours Penfret derrière nous, on n'arrive pas à en décoller.

Nous ne sommes pas très étonnés lorsque Yann nous annonce:
- On a gagné 3 milles en 3h. Si on continue à ce rythme-là, on arrive à Audierne dans 30 heures! Donc, désolé, mais il va falloir mettre le moteur en route. Et même avec le moteur, on n'arrivera pas avant 23h.

Et c'est effectivement à 23h04 pour être précis que Yannick mouille l'ancre devant Ste Evette, comme en 2007. La température est agréable, les cinq marins n'auront pas de soucis pendant leur veille de nuit.



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9 août 2010 - Audierne / Aber Wrac'h

Comme hier, le petit-déjeuner est prêt à 8h. Comme hier, nous levons l'ancre peu avant 9h. Mais hélas comme hier, il n'y a pas un poil de vent! Nous passons le Raz de Sein sur une mer d'huile. Sans vouloir emprunter ce passage particulièrement dangereux
avec des vents de force 7, c'est quand même frustrant de le passer comme si c'était un lac!

Toutefois, ce temps trop clément nous donne la possibilité d'admirer la beauté sauvage de la Pointe du Raz, du phare de la Pointe des Chats, celui de La Vieille qui n'a plus sa tour Temperley arrachée par la tempête en 2008, et celui de Tevennec. Dans le même temps nous envoyons le flèche en cul. Jusqu'à présent je n'avais jamais eu l'occasion de l'établir. L'opération n'est pas simple, puisque cette voile haute est au départ gréée sur sa vergue et posée sur le pont. Il faut donc hisser le tout, jusqu'en haut du grand mât, en évitant les différents cordages, haubans, voiles et pic de brigantine. Il faut souvent s'y reprendre à plusieurs fois. Mais là ça passe du premier coup. Cette voile supplémentaire nous fait gagner un peu plus d'un demi-nœud, ce qui n'est pas si mal.

Nous passons au large de la presqu'île de Crozon à une vitesse plus que modeste.. Yann tient quand même à nous rassurer en annonçant que nous devrions toucher du vent en entrant dans le chenal du Four. On voit d'ailleurs qu'on se rapproche de plus en plus d'un ciel nuageux annonciateur d'un changement. Ce chenal, je l'ai emprunté de nuit l'an dernier avec La Boudeuse. Ce n'est pas très large, et pas très droit, mais de jour c'est beaucoup moins impressionnant.

Il est vrai qu'à l'approche du chenal, on sent le vent monter en puissance. Dans le même temps, le courant se fait sentir, et on peut voir les marbrures qu'il forme à la surface de l'eau. Le vent ne soulève pas de houle, et de ce fait la navigation reste particulièrement confortable.

On a gagné de la vitesse, mais on a perdu le ciel bleu! Dommage. La plupart des autres passagers sont bretons du Finistère. Ici ils sont chez eux, et tendent le bras en direction de leur "pays", de leur village, et des amers qu'ils reconnaissent sans faille. Même si parfois la brume les fait un peu hésiter, car les Roches d'Argenton et de Portsall nous maintenant à bonne distance de la côte. L'un d'entre eux peste d'ailleurs contre ce ciel maussade:
- Peuh, c'est normal, ici c'est un pays de sauvages.
- Mais dis donc, tu n'es pas d'ici toi?
- Si, mais c'est quand même un pays de sauvages!

Il nous aura fallu quarante minutes pour parcourir les 2 milles séparant la Pointe St Mathieu et Le Conquet et juste une heure et demie pour faire les 10 milles restants jusqu'au Four. Cet effet d'entonnoir nous a fait passer de 2,2 à 6,6 nœuds. Nous arrivons à l'entrée de l'Aber Wrac'h à 18h dans le brouillard. C'est tout juste si l'on devine le phare de l'Île Vierge, pourtant le plus haut phare d'Europe.

A 18h30 La Recouvrance est amarrée à la tonne, une sorte de camembert flottant de deux mètres de diamètre lesté d'un poids d'une tonne. Comme lors d'un amarrage au coffre, cela évite la veille de nuit.

Marie-Laure est venue nous rendre visite en voisine. Après l'apéritif, poussée par l'équipage qui la connaît bien, elle finira par dîner avec nous, pour notre plus grand plaisir.



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10 août 2010 - Aber Wrac'h / Roscoff

Pour ne pas déroger à la règle, petit-déjeuner à 8h, largage des amarres à 9h. Il fait un temps de cochon. Il a plu toute la nuit et il fait froid. On supporte bonnet, pull et vareuse. En revanche, la bonne nouvelle, c'est que comme prévu par Météo France il y a un vent de sud-ouest qui est bien installé. Et ça c'est bon pour nous car on va naviguer grand-largue.
D'ailleurs, pour ne pas se faire surprendre, Yann décide d'établir la misaine en prenant un ris. Pendant la première heure, nous prenons les vagues par le travers car pour aller chercher les meilleures conditions, Yann a choisi une route qui s'écarte de la côte. La goélette roule de façon assez brutale sur bâbord, ce qui ne fait pas l'affaire de tous. Moi, j'adore, j'aime quand ça bouge.

Après une heure de cette navigation heurtée, nous effectuons un virement de bord lof pour lof, c'est à dire vent arrière. Certains disent de cette manœuvre que c'est un empannage réussi! Il est vrai que l'opération est très physique, voire dangereuse si elle n'est pas parfaitement maîtrisée. En particulier, le passage d'un bord à l'autre de la misaine est très délicat. Contrairement à la brigantine, la misaine n'est pas bômée. Il faut donc la choquer avec précaution, sinon elle claque violemment en prenant le vent de l'autre bord, ce qui peut être dangereux pour ceux qui sont à la
manœuvre.

Nous naviguons maintenant plein ouest, grand largue tribord amure, le hunier et le perroquet sont brassés carré, et c'est beaucoup plus confortable. Du côté du ciel malheureusement la situation ne s'arrange pas. Nous avons juste le temps de prendre l'apéritif sur le pont que les premières gouttes font leur apparition. Et cette satanée pluie ne va plus nous quitter. La manœuvre de Yann a payé. Deux voiliers bien plus légers que La Recouvrance ont viré de bord bien plus près de la côte et se retrouvent maintenant largement derrière nous!

Nous arrivons un peu tôt pour prendre le chenal entre l'Île de Batz et la côte. Du coup nous contournons l'île par le nord, ce qui va rallonger notre temps de navigation, et malgré le mauvais temps personne ne s'en plaindra. Et comme il nous faut ensuite remonter au vent pour rejoindre Roscoff, nous aurons droit à trois virements de bord vent devant. Bien coordonnés par les cinq membres d'équipage, nous effectuons ces manœuvres sans problème et avec plaisir.

Nous nous amarrons au port des ferries. La Recouvrance aurait mérité le vieux port, mais devant repartir deux heures plus tard il y aurait eu un problème de hauteur d'eau...

Quand je dis que le monde des Grands Voiliers est petit... A peine grimpé sur le quai, je tombe nez à nez avec Jean-Yvon, qui avait commandé La Boudeuse en descendant la Seine (voir La Boudeuse en Seine). Il est aujourd'hui le patron de la vedette SNSM qui nous a dépassé il y a quelques minutes à peine!

En deux ans La Recouvrance a considérablement évolué. Sans parler des nombreux cordages changés chaque année et des travaux d'entretien qui font de la goélette un voilier particulièrement agréable, il y a eu de réels progrès accomplis dans le domaine de la sécurité et du respect de l'environnement. Concernant la sécurité, on pourrait même presque parler de suréquipement, tant dans le matériel de sauvetage que dans la lutte anti-incendie. Et on ressent bien dans le discours du capitaine et dans l'attention constante des marins que la sécurité est vraiment un enjeu majeur. Le nouveau moteur est plus efficace, moins gourmand, plus silencieux, le contenu des caisses est retraité avant d'être largué, même si les odeurs sont toujours présentes! Et il nous a semblé également que l'aspect "voilier école" a encore progressé. Et mention particulière à Pascal le cuistot qui nous a régalé pendant ces trois jours, et toujours avec le sourire!

J'espère simplement qu'en ces temps de crise économique et de resserrement des budgets, personne n'aura la mauvaise idée de diminuer celui de l'entretien ou de réduire les effectifs.



Voir la fiche technique de La Recouvrance

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